L’Université d’été de la e-santé se tiendra à Castres les 7 et 8 juillet. Rémi Bastide, responsable de la recherche à l’école d’ingénieurs ISIS de Castres, explique que la mise au point de solutions pour la prise en charge des patients doit prendre en compte leurs besoins, ceux des soignants, et le contexte social.
Qu’attendez-vous des rencontres e-santé de Castres les 7 et 8 juillet ?
C’est l’occasion pour nous chercheurs de rencontrer les industriels, les médecins, les centres hospitaliers et les décideurs. En effet, si les innovations en matière de nouvelles technologies applicables à la e-santé viennent de la recherche et des industriels, elles doivent correspondre à la demande du secteur médical.
Elles doivent aussi présenter des modèles économiques viables pour les politiques, qui vont élaborer la réglementation au sujet de leur prise en charge. Ces rencontres sont donc l’occasion pour tous les acteurs de dialoguer et de faire émerger des idées.
Comment définir la e-santé ?
C’est la convergence des technologies de l’information et de la communication (TIC) et des besoins du secteur de la santé. Internet, la géolocalisation par GPS par exemple, les outils de communication comme les Smartphones, vont permettre d’accéder à de l’information et de la transmettre au bénéfice du patient.
Quelles problématiques de santé publique intéressent la e-santé ?
La plus importante est liée au vieillissement de la population. Selon l’Insee, les personnes de plus de 75 ans sont 4 millions en France actuellement, elles seront 10 millions en 2040. Or, beaucoup peuvent être affectées par des maladies chroniques liées à l’âge : difficultés respiratoires, cardiovasculaires, diabète, etc.
Il faut réorganiser le système de santé pour les prendre en charge. Car on ne pourra pas soigner des millions de personnes à l’hôpital ou en maison de retraite. D’ailleurs, beaucoup de personnes âgées préfèrent rester à domicile avec un soutien médical.
Il y a aussi le cas des personnes âgées isolées, ou souffrant d’Alzheimer. Il existe actuellement pour ces personnes des systèmes d’alarme en cas de chute, mais ils ne fonctionnent pas toujours très bien. Dans certains cas, c’est aussi l’acceptabilité du dispositif par le patient qui pose problème.
C’est pourquoi la recherche en e-santé doit être pluridisciplinaire, elle doit associer la technologie au « facteur humain », avec le concours des ergonomes, des sociologues, ainsi que des économistes pour déterminer si les coûts sont supportables.
Sur quoi porte la recherche de votre équipe (*) à l’ISIS ?
Sur les systèmes liés à l’hospitalisation et au maintien à domicile. L’hospitalisation à domicile est conduite sous le contrôle d’un centre hospitalier, avec des visites régulières d’infirmières par exemple. Nous cherchons à concevoir la liaison entre ce qui se passe au domicile, comme le monitoring de paramètres vitaux de la personne, et le système d’information de l’hôpital.
Il faut pouvoir, par exemple, transférer les données alors que les personnes ne sont pas dans des zones couvertes par Internet à haut débit, ou ne sont pas abonnées. On peut alors avoir recours au GSM, ou au téléphone classique. Il faut trouver une solution pour chaque cas.
Par ailleurs, nous nous intéressons à la gestion des plannings de visite du personnel soignant. Grâce à la géolocalisation, on peut par exemple optimiser le parcours des infirmières itinérantes en fonction de l’urgence que présente tel ou tel patient. Ou planifier les interventions des soignants dans le cas d’un maintien à domicile de longue durée.
L’objectif final est de créer un système d’information totalement intégré, qui prendrait tous les paramètres en charge, jusqu’à la facturation par les caisses d’assurance-maladie. Aujourd’hui, nous n’avons que des briques de ce système
Existe-t-il des systèmes de géolocalisation pour les patients ?
Oui. Par exemple, l’IRIT collabore avec la société Atos Origins sur une nouvelle génération de bracelets dotés d’un système de géolocalisation, capable de fonctionner à l’intérieur aussi bien qu’à l’extérieur. L’objectif est de localiser avec précision des patients atteints d’Alzheimer à l’intérieur d’une maison de retraite ou dans le parc de celle-ci, en générant une alarme en cas de sortie d’une zone de sécurité.
Ceci permettrait de leur laisser plus de liberté de mouvement qu’ils n’en ont aujourd’hui. On pourrait aussi ajouter à ce bracelet des capteurs, de rythme cardiaque par exemple. Mais les problèmes à résoudre sont multiples : poids du bracelet, autonomie, etc.
Comment assurer la confidentialité des données dans la e-santé ?
C’est un point important sur lequel travaillent d’autres équipes de recherche, par exemple à l’IRIT ou au LAAS à Toulouse. Une solution possible pour garantir la confidentialité est que les données peuvent être traitées localement, par ce que l’’on appelle des capteurs intelligents.
Par exemple, si on imagine un système de caméras installées au domicile d’un patient pour détecter les chutes, on pourra intégrer un logiciel à la caméra qui identifiera et signalera une chute, et ce sans avoir besoin de transmettre les images.
Ainsi, la vie privée de la personne sera respectée. C’est fondamental pour faire accepter ce genre de système.
Propos recueillis par Jean-François Haït, pour KwantiK !
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(*) Équipe principalement rattachée à l’Institut de recherche en Informatique de Toulouse (IRIT)