Lancé en décembre 2009, le satellite espion français est désormais opérationnel. Brigitte Tedaldi, chef de projet Hélios 2b chez Astrium Toulouse, revient sur la conception du satellite et évoque la prochaine génération, Pléiades, des engins petits et mobiles.
Le satellite Hélios 2b (1) vient d’achever sa « recette en vol ». De quoi s’agit-il ?
Juste après le lancement, le 18 décembre dernier, tous les instruments et systèmes ont été mis en route. La recette en vol a alors débuté. Cette étape consiste à vérifier un par un le bon fonctionnement de tous les sous-ensembles : le système d’alimentation électrique, le contrôle d’attitude, autrement dit la position du satellite sur son orbite, les ordinateurs de bord, les instruments d’acquisition des images et la transmission de ces images vers le sol.
Ces vérifications, qui ont pris environ trois mois confirment qu’Hélios 2b est opérationnel. C’est pourquoi il vient d’être remis définitivement à son principal client, le ministère français de la Défense, et à ceux des pays associés au projet (2).
Quel a été le rôle d’Astrium Toulouse dans le projet ?
Astrium est le maître d’œuvre du satellite. A Toulouse, nous avons réalisé l’assemblage de la plateforme, de la « case à équipements » qui contient les systèmes vitaux du satellite, et des instruments. Nous avons réalisé la recette en vol avec la DGA et le Cnes, qui est le maître d’ouvrage du satellite et assure en outre le contrôle de l’orbite du satellite depuis le Centre spatial de Toulouse.
Au total, plus de 150 personnes ont été mobilisées pour Hélios 2b sur notre site. C’est sans conteste un des plus gros projets de ces dernières années.
De quoi les instruments du satellite sont-ils capables ?
Ces instruments observent dans les longueurs d’onde du visible, mais aussi dans l’infrarouge, ce qui permet de voir de nuit et de détecter des sources de chaleur qui témoignent d’une activité humaine. Hélios 2b dispose d’un instrument à large champ de vision, fabriqué par Astrium, identique à celui qui équipe le satellite civil Spot 5, et un autre spécifique, à haute résolution, fabriqué par Thalès Alenia Space à Cannes.
Il faut souligner que le satellite permet de prendre des clichés en « stéréo ». En effet, il est possible, en le basculant légèrement d’avant en arrière sur son orbite , de réaliser plusieurs clichés d’un objet lors de son survol. L’assemblage des clichés donne une vue en trois dimensions de l’objet, ce qui est beaucoup plus intéressant.
Quelle est la résolution maximale atteinte ?
Elle est secrète, bien entendu… (3)
Comment se fait la réception des images ?
Il y a une station principale à Creil, dans l’Oise, où se fait aussi la planification des observations, et qui transmet ses instructions au Cnes à Toulouse. Et chaque pays partenaire a sa propre station, la dernière devant être prochainement installée en Grèce.
Chaque fois qu’il est en vue d’une station, le satellite décharge les images qu’il avait stockées par une liaison dédiée, qui est cryptée pour des raisons de sécurité.
Y aura-t-il un Helios 3 ?
Non, Hélios 2b est le dernier satellite militaire de sa génération. Le programme avait été lancé il y a longtemps et désormais, on va vers un concept différent. Son successeur sera le programme CSO (4), pour lequel la conception et le développement des technologies est en cours.
Il s’inspirera sans doute beaucoup de la prochaine génération de satellite d’observation que sont les satellites Pléiades. Il s’agit de deux satellites d’usage à la fois civil et militaire, beaucoup plus petits, donc plus aisés à manœuvrer sur leur orbite pour prendre des images sous tous les angles, et qui correspondent à un besoin actuel de versatilité.
Cette capacité a demandé d’importants développements technologiques. Aujourd’hui, les deux satellites sont dans nos salles blanches à Toulouse, pour leur assemblage final. Ils devraient être lancés au début de 2011.
Propos recueillis par Jean-François Haït, pour KwantiK !
(1) Hélios 2b a rejoint en orbite Hélios 1a (lancé en 1995) et Hélios 2a (lancé en 2004). Les trois satellites assurent désormais une couverture globale de la Terre
(2) Belgique, Espagne, Italie, Allemagne, Grèce.
(3) Hélios 2b aurait la capacité de voir des détails de l’ordre de quelques dizaines de cm, selon Thalès Alenia Space (NDLR)
(4) CSO (Composante spatiale optique), devrait constituer une partie du projet Musis (multinational space-based imaging System for surveillance, reconnaissance and observation), le futur système européen d’imagerie spatiale, qui comprend des éléments spatiaux et au sol.