« La région Midi-Pyrénées est matériellement en retard sur le programme Galileo », regrette Marc Pollina, directeur de la société M3 Systems, spécialisée dans les technologies de navigation. En marge des colloques qui ont rythmé le Toulouse Space Show, certains professionnels toulousains ont quelque peu écorné l’image de la région « capitale du spatial ».
En ligne de mire, la lenteur dans l’élaboration du projet de plate-forme au sein de laquelle les entreprises pourraient tester leurs applications. Un laboratoire dont on parle depuis des années dans la région, auparavant connu notamment sous le nom de Navigation Valley.
Il est désormais baptisé GUIDE (1), et les choses semblent avancer. « Le dossier de demande de financement a été déposé au ministère de l’Economie, de l’Industrie et de l’Emploi, et la réponse sera connue prochainement », explique Marc Pollina, chargé de porter le projet pour Midi-Pyrénées.
« Dans d’autres régions européennes, comme en Bavière, en Angleterre à Nottingham ou même à Rome, des initiatives de plateformes techniques ont déjà pris forme, souligne-t-il. Nous n’avons pas été bons collectivement. »
Midi-Pyrénées peut rattraper son retard grâce à cette plateforme, mais à condition de travailler sa présence européenne, ajoute le directeur de M3 Systems. Participer plus aux projets européens, utiliser davantage le réseau NEREUS (2), établir des alliances avec des régions qui soient des partenaires clients : il faut jouer la carte de la collaboration et ce, très rapidement !
Guerre d’innovation
Car la région dispose d’atouts indéniables pour se positionner en leader du programme Galileo, sur des activités de niches ou très innovantes. Son fort potentiel provient de la masse critique du pôle de compétitivité Aerospace Valley, d’un vaste tissu d’entreprises du spatial et d’un territoire assez large pour avoir de nombreux utilisateurs d’applications.
En effet, si des grands noms comme Thalès Alenia Space (responsable du segment sol du programme Galileo) ou Astrium (malgré la perte récente du contrat de construction de satellites Galileo remporté par l’allemand OHB) assoient le leadership de la région, c’est sur le développement d’applications destinées au grand public et aux professionnels que se joue la compétition.
Des exemples d’applications à la pointe en Midi-Pyrénées ? Celles développées en agriculture de précision par Astrium Services, en navigation par la PME Novacom reconnue dans le domaine de la géolocalisation. Citons également Spot Image, leader en imagerie spatiale. Ou encore M3 Systems, qui développe actuellement des services pour faciliter le transport fluvial ou le transport de matières dangereuses.
Toulouse, berceau d’EGNOS
Rappelons aussi que l’initiative d’EGNOS (3), le programme d’amélioration du système GPS qui préfigure Galileo, est née au CNES. « Le siège européen de l’ESSP (4) chargé d’opérer EGNOS a même déménagé de Bruxelles en 2009 pour s’installer à Toulouse », souligne Fabien Sitruk, responsable des relations techniques régionales au CNES et délégué aux affaires spatiales à Aerospace Valley.
Preuve supplémentaire que la région Midi-Pyrénées, face à la course européenne au leadership technologique, ne peut se permettre de s’endormir sur ses lauriers.
Agnès Baritou, pour KwantiK !
(1) GNSS Usage Innovation and Development of Excellence
Partenaires : Aerospace valley, Grand Toulouse, CCI du Gers, Nogaropole, Communauté d’agglomération du grand Dax, Région Midi-Pyrénées, Communauté d’ Agglomération Bayonne Anglet Biarritz, Région Aquitaine, Cnes, Thales Alenia Space, Eads Astrium, Caisse des dépôts, Helileo, CS, Telespazio, M3 systems, Silicom, Capgemini, OKTAL-SE, MaxSea, Enac, ISAE.
(2) Network of European Regions Using Space Technologies
(3) Service Européen de Navigation par Recouvrement Géostationnaire
(4) European Satellite Services Provider
Galileo : la clé de l’autonomie pour l’Europe
Le programme Galileo, géré par la Commission européenne et l’Agence spatiale européenne, doit permettre l’autonomie de l’Europe par rapport aux Etats-Unis en matière de positionnement par satellite. Il doit aussi garantir la fiabilité des mesures, ce que ne fait pas le système GPS.
A la clé, cinq services : service ouvert, similaire à l’utilisation actuelle du GPS ; service commercial lié aux applications ; service de sauvegarde des vies humaines (aviation, navigation) ; service gouvernemental (notamment militaire) ; service de secours et de recherche.
Les quatre premiers satellites de la constellation d’une trentaine de satellites prévus seront lancés dans un an ou deux. Galileo serait opérationnel en 2014 – une date qui parait trop proche pour bon nombre de professionnels.