« L’image de synthèse d’un jeu est recalculée en temps réel ce qui la rend particulièrement réaliste. Le son, en revanche, est statique, il est puisé dans une bibliothèque de sons pré-enregistrés. Or, il existe des technologies audio qui peuvent le rendre dynamique… » Tel était le constat fait par Amaury La Burthe alors qu’il était employé par le géant Ubisoft au design sonore de ses jeux.
Passé par l’IRCAM – l’Institut de recherche et de coordination acoustique/musique et temple de la musique contemporaine – puis par le laboratoire Sony CSL, deux centres de recherche consacrés à l’audio, ce passionné de son de 35 ans crée Audiogaming à Toulouse début 2009. Objectif : fabriquer du son qui change en temps réel, en fonction par exemple des mouvements du personnage d’un jeu et de l’environnement dans lequel il se trouve.
La jeune société, entrée dans l’Incubateur Midi-Pyrénées début 2010, a développé son propre « moteur », un programme informatique capable de rendre le son dynamique. Une interface supplémentaire permet au programmeur de ne jouer que sur les paramètres qui l’intéressent. Pour une folle course de voitures, ce sera le son de l’accélération, du freinage, du dérapage… Quant au chevalier du jeu de fantasy, on pourra par exemple moduler le souffle de son épée qui fend l’air, et même donner à ce souffle une « couleur sonore » différente en fonction de l’ambiance du jeu.
Séduire les grands studios
Un jeu que de plus en plus, le joueur pilotera par ses mouvements détectés par des capteurs. C’est déjà le cas avec la console Wii de Nintendo, ce sera dans les prochaines semaines au tour de la PS3 de Sony et de la Xbox 360 de Microsoft. Surfant sur cette vague, Audiogaming vient de mettre sa solution « AudioGesture » sur le marché : elle permet de synthétiser le son en fonction des gestes que fait le joueur. « Il fonctionne sur console et sur PC, et nous préparons une version pour l’iPhone d’Apple », précise Amaury La Burthe. Avec l’ambition d’inciter très rapidement les grands studios à l’adopter, pour se donner ainsi un maximum de visibilité.
Par ailleurs, une cinquantaine de sons sont aujourd’hui disponibles dans le catalogue, et Audiogaming fait du sur-mesure à la demande. Mais le système universel, capable à partir de n’importe quel son enregistré dans la nature, de le rendre « jouable », est un objectif encore lointain. « Il est particulièrement difficile, par exemple, de synthétiser la voix humaine, au réalisme de laquelle notre oreille est très sensible. Il y a de la recherche sur ce sujet. Mais ce n’est pas notre domaine ».
Audiogaming se positionne sur tous les autres sons et regarde du côté des jeux, mais aussi des « jeux sérieux » et autres simulateurs. « Nous pouvons proposer une grande finesse pour les simulateurs de vol, alors qu’aujourd’hui, le son des moteurs ou de l’air à l’extérieur de l’appareil est assez basique », explique le jeune chef d’entreprise.
Des recrutements en 2010 et 2011
Un esprit d’innovation qui a a valu à Audiogaming d’être lauréat en 2009 et 2010 du Concours national d’aide à la création d’entreprise de technologie innovante, organisé par le ministère de la recherche et mis en œuvre par Oséo. « Ce prix est doté d’une aide financière très appréciable, qui prouve que le projet est crédible sur le plan de l’innovation mais aussi sur le plan commercial. Nous allons amorcer la pompe », se félicite Amaury Laburthe. Résultat : un recrutement prévu cet automne, d’un post-doctorant spécialiste de l’audio, car Audiogaming, si elle n’est pas directement issue d’un laboratoire, garde des liens forts avec la recherche. Quant au plan de croissance, il prévoit un effectif de six personnes à la mi-2011 et une dizaine début 2012.
Pour la jeune société, il reste désormais à se faire un nom. « Toulouse n’est pas synonyme de jeu vidéo. Ce secteur est plus important à Montpellier ou Lyon. Mais du fait de notre spécialisation sur le son, ce n’est pas un handicap. Nous avons vocation à nous faire connaître partout dans le monde ».